ASSAUT
Le film culte de
John CARPENTER
en version restaurée
AU CINÉMA
LE 27 DÉCEMBRE 2023
Synopsis
Anderson, un quartier déshérité de Los Angeles. Le lieutenant Bishop est chargé d'assurer la dernière nuit de garde dans le commissariat du treizième arrondissement, qui va être fermé. Il s'y installe avec un inspecteur, trois gardes, un agent et deux secrétaires, ainsi que deux prisonniers en attente de transfert. C'est alors qu'un homme hagard fait irruption. Il est pourchassé par des tireurs qui prennent d'assaut le poste de police. Alors que la tension monte le lieutenant Bishop doit pactiser avec les prisonniers. Sans aucun moyen de communication avec l'extérieur, puisque le téléphone a été coupé, les occupants du commissariat vont subir un véritable siège...
Premier film professionnel de John Carpenter, Assaut contraint le cinéaste à se plier à un plan de travail. Confronté à la réalité du système de production, Carpenter met calmement à profit cette expérience pour ébaucher ses thèmes, ériger les bases de son style et dévoiler toutes ses obsessions.
ASSAUT : GENÈSE D'UN FILM CULTE
En 1974, John Carpenter alors âgé de 25 ans mettait en scène son premier long métrage Dark Star. cette comédie de science-fiction était à la base un film de fin d'étude qui fut rallongé de plusieurs scènes pour une exploitation dans les salles américaines.
La genèse d’Assaut débuta la même année. Fasciné par l’énergie d’un jeune homme capable d’affronter les apparatchiks de sa faculté en refusant de leur céder les droits du film, J.Stein Kaplan (producteur associé sur Dark Star) s’enthousiasme à l’idée de poursuivre sa collaboration avec John Carpenter. Recherchant un financement susceptible de permettre au cinéaste de réaliser un autre long-métrage, Kaplan réunit ses contacts de Philadelphie pour leur proposer un marché. Mais, à cette époque, sur la côte Est, personne n’a vu Dark Star. Cela n’empêche pas Joseph Kaufman de remarquer les mérites d’un script écrit par Carpenter : Eyes. Immédiatement, il tente de réunir le budget nécessaire au tournage du film. Mais ses efforts sont réduits à néants lorsqu’il apprend par hasard que John a vendu son scénario à Barbra Streisand, qui souhaite en faire un film de série A dont elle occuperait le rôle principal. Pas découragé, Joseph Kaufman décide de commander à Carpenter deux nouveaux scénarios, de manière à produire avec Kaplan deux films à petit budget, cette opération ayant été rendue possible par la manne financière représentée par l’achat de Eyes (qui deviendra Les Yeux de Laura Mars).
Cependant, Carpenter désire porter à l’écran une suite de Rio Bravo, d’Howard Hawks, mais sachant qu’il ne disposerait pas de suffisamment d’argent pour financer le film, il abandonne le projet et rédige en huit jours une version moderne du chef-d’œuvre de son maître à partir d’un fait divers authentique. En 1975, avec un budget très mince qui avoisine à peine 100.000 dollars, le jeune cinéaste tourna alors en moins de quatre semaines, pendant parfois 24 heures d'affilée, som premier long métrage. Ainsi, hormis pour la conduite des automobiles, aucun cascadeur n’est engagé. Les gangsters sont incarnés par des techniciens, des amis ou encore des professeurs de fac de John Carpenter. Ben Burtt, le futur lauréat de l’Oscar du meilleur son pour Star Wars y interpréta par exemple le rôle d’un bandit défenestré. Doté d’une foi incomparable en la série B, Carpenter transforme toutes ces avanies en autant d’atouts et prouve dans Assaut que le charme hypnotique de ses films est le corollaire de la liberté dont il dispose, et non du budget qu’on lui propose.
CROISEMENT ENTRE RIO BRAVO
ET LA NUIT DES MORTS VIVANTS
En plus d'emprunter la trame du film d'Howard Hawks Rio Bravo (avec des fusils plus gros cependants), et allant jusqu'à réutiliser des tics cinématographiques du réalisateur (comme en atteste par exemple la position dominante de la cigarette dans tout dialogue spirituel), Assaut semble constituer un croisement entre le western d’Hawks et le film fantastique de George A. Romero. En effet, il mélange un groupe d’hommes assiégés comme dans Rio Bravo et met en scène la menace, comme dans La Nuit des morts vivants. « Big John » Carpenter le souligne d’ailleurs lui-même : « L’idée du commissariat provient de Rio Bravo d’Howard Hawks avec lequel mon film entretient des rapports privilégiés »[1]. Le cinéaste est même allé jusqu’à emprunter le nom de « John T. Chance », qui est celui porté par John Wayne dans le film d’Hawks, pour signer le montage d’Assaut. Il ajoute plus loin, « La scène où l’on voit des gouttes de sang couler sur le toit de la voiture de la police est d’ailleurs un hommage à la séquence d’ouverture de Rio Bravo, où Dean Martin repère un bandit grâce à des gouttes de sang qui tombent dans son verre. Avec Seuls les anges ont des ailes, Rio Bravo est le film de Hawks que je préfère. »[2]
Donnant à percevoir des craintes historiques (émeutes, ghetto, exclusion) caractérisées par des horreurs politiques avérées (discrimination raciale, mauvaise gestion du territoire), Carpenter fait ainsi littéralement le siège des valeurs familiales, religieuses et privées. Comme chez Hawks, « l’action l’emporte sur l’éducation et les préjugés. », tel que le rappelle Bertrand Rougier[3]. Les personnages ne doivent ainsi leur salut « qu’au respect d’un code d’honneur strict, basé sur le courage, la loyauté et la confiance »[4]. Assaut révèle ainsi un groupe d’individus, représentant un pan de la société américaine, soudé dans l’adversité, et offre une vision terrifiante de l’homme au cœur du chaos.
[1] Luc Lagier et Jean-Baptiste Thoret, Mythes et Masques, Les fantômes de John Carpenter, Dreamland, 1998.
[2] Ibid.
[3] Bertrand Rougier, « Carpenter lâche l’émeute » pour Mad Movies, Hors-Série, 2001, p.34.
[4] Ibid.
Toujours d’après Bertrand Rougier, dans Assaut, «(…) l’évasion d’un espace clos débouche évidemment sur la reconquête du monde. Sous-jacente chez Hawks, cette thématique avait déjà valeur de constat, le réalisateur affirmant que la recherche d’un nouvel équilibre est une priorité pour extirper la société du chaos dans lequel elle s’enfonce. Carpenter communique de façon identique son désir de substituer aux anciennes valeurs ségrégationnistes un système moral fondé sur l’égalité et la justice. Mais, ne se contentant pas d’un remake, il réinterprète plusieurs figures majeures du cinéma Hawksien. Par exemple, si l’usage de plans panoramiques dévoile systématiquement une menace, ces derniers ne véhiculent plus du tout l’illusion d’une harmonie encore accessible. D’autre part, Rio Bravo exposait d’emblée l’identité et l’objectif des tueurs, le suspense étant construit sur le moment de l’attaque. Au contraire, Assaut ne révèle jamais franchement les ambitions ni le visage des gangsters, le film se nourrissant précisément de ces interrogations pour alimenter la teneur fantastique du récit. » [1]
D’un autre côté, Carpenter va prolonger le film-somme de George Romero La Nuit des Morts-Vivants, qui posa en 1968 les jalons d’un cinéma subversif. En effet, dans les deux films, un héros noir se distingue par des gestes précis, sobres, adéquats. Dans ce lieu clos où règne souverainement l’effroi, qui fait du film un accablant cauchemar, le personnage noir incarne l’espoir. Bertrand Rougier analyse de surcroît que dans les deux œuvres, « les rapports de tension au sein d’un groupe illustrent les choix politiques des réalisateurs et leurs jugements sur la société américaine » qui, dans les années soixante-dix, fut privée de ses repères fondamentaux. Il ajoute qu’une « petite fratrie d’être liés par le désir de survivre est emprisonnée dans un espace lui étant homogène : fermé, étranglé, angoissant. Le commissariat devient un abri troué dans lequel la mort peut s’infiltrer. Ainsi, la lenteur des déplacements des assaillants, masse unitaire soumise à une régénération permanente, rappelle la procession des morts-vivants du film de Romero. Ces derniers sont ici anamorphosés en vivants-morts, l’univers et les protagonistes d’Assaut n’étant pas seulement en état de décomposition, mais bien au seuil du trépas. »[2]
[1] Op.cit.
[2] Op.cit.
JOHN CARPENTER
Pour les studios de la fin des années 70, il était un talent prometteur. Pour ceux des années 80, un énergumène ingérable. Pour la critique américaine, il ne fut jamais rien d’autre qu’un technicien limité à un genre populiste. Pour ses fans européens, il symbolise le Maverick moderne. Pour d’autres encore, il est un pur cynique, alors que lui-même se considère comme naïf. Pratiquement tous ceux qui s’intéressent à son cas lui reconnaissent une certaine constance, assimilent sans peine le personnage à ses films, lui font porter de multiples casquettes plus ou moins militantes, sans pourtant s’accorder sur une définition de ce qu’est « John Carpenter ».
Les éléments biographiques de John Carpenter ne font pas légion, mais plutôt sa filmographie, qui semble le catalyseur de son moi le plus profond. Carpenter se révèle à la fois comme un narrateur cartésien hors pair, un cadreur perfectionniste, un naïf pessimiste et anarchiste, un monteur-compositeur-interprète à la rythmique infaillible et à la rock’n’roll attitude et un fidèle conservateur des grandes traditions cinématographiques, amoureux dévolu à l’entité cinéma.
Né en 1948 à Carthage dans l’Etat de New York, il grandit dans les plaines de Bowling Green au Kentucky. Il commence à étudier le cinéma en 1974 à l’Université de California du Sud où il réalise Dark Star. En 1978, il connaît son premier succès avec Halloween, La Nuit des Masques en créant par la même occasion un nouveau genre horrifique. Il réalise ensuite deux téléfilms dont Le Roman d'Elvis (1979) où il rencontre Kurt Russell qui sera tête d'affiche de son New York 1997 (1981). En 1982, il réalise The Thing puis Christine (1983) d'après le roman de Stephen King et Starman (1984). En 1986, Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin est un échec qui lui coûte sa crédibilité au sein des studios américains. Il se tourne alors vers de plus petits budgets comme Prince des ténèbres (1987), Invasion Los Angeles (1988) et de plus conséquents avec Les Aventures de l'homme invisible (1992) et Le Village des damnés (1995). L'Antre de la folie (1995) lui permet d'obtenir à nouveau les faveurs des studios et il réalise alors pour un budget colossal, Los Angeles 2013 (1996). En 1998, il réalise un western moderne, Vampires avec James Woods. En 2001, il se plonge à nouveau dans un univers futuriste, cette fois peuplé de spectres, dans Ghost of Mars.
FILMOGRAPHIE DU RÉALISATEUR
1974 Dark Star
1976 Assaut (Assault on Precinct 13)
1978 Halloween, la nuit des masques (Halloween)
1980 Fog (The Fog)
1981 New York 1997 (Escape from New York)
1982 The Thing
1983 Christine
1984 Starman
1986 Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin (Big Trouble in Little China)
1987 Prince des ténèbres (Prince of Darkness)
1988 Invasion Los Angeles (They Live)
1992 Les Aventures d'un homme invisible (Memoirs of an Invisible Man)
1995 L'Antre de la folie (In the Mouth of Madness)
1995 Le Village des damnés (Village of the Damned)
1996 Los Angeles 2013 (Escape from L.A.)
1998 Vampires
2001 Ghosts of Mars
2011 The Ward : L'Hôpital de la terreur (The Ward)
INTERVIEW DE JOHN CARPENTER
« Et puis, en 1959, à onze ans, j’ai découvert Rio Bravo. Toute la ville se battait pour aller voir ce film, je me suis demandé ce que cela pouvait signifier. Je n’avais aucune conscience du système mis en place derrière tout ça, mais je me suis dit que quelque chose d’énorme se tramait là-dessous, et je voulais en faire partie. » J.Carpenter
Avec Assaut, vous étiez parti dans l’optique de vous réapproprier le mythe de Rio Bravo.
En quelque sorte, oui.
N’était-ce pas un peu trop ambitieux à vingt-six-ans ?
Non, pourquoi ? Il faut avoir confiance en soi, sinon il est impossible de progresser. Il faut parfois faire preuve de témérité, c’est seulement plus tard que l’on développe la peur de l’échec.
Derrière les influences westerns et l’ancrage dans la série B, Assaut dégage une vision de la violence urbaine assez sinistre. Quel est votre point de vue aujourd’hui ?
(Soupirs)…. L’enjeu à l’époque, était de définir les intervenants sans les enfermer dans une seule catégorie bien distincte, une seule race. Nous voulions un gang mixte qui n’existerait que dans ce monde de fantaisie qu’est le cinéma. La situation aujourd’hui n’est pas reluisante, regardez ce qu’ils ont fait au commissariat ici à Los Angeles. Il y a eu un article dans Rolling Stone Magazine qui affirmait que les gangs de L.A. avaient infiltré la police. (…) Le pire c’est qu’ils n’ont que faire des victimes, ils arrosent les rues, un point c’est tout. Les gamins apprennent à se jeter par terre lorsqu’ils entendent des coups de feu. Je ne pense pas que mon film était si terrible quand je vois les rues de L.A. aujourd’hui.
On ne vous laisserait cependant pas tourner la scène du gamin aujourd’hui.
Absolument. Hollywood est terrifié par la violence aujourd’hui, ce sont de véritables poules mouillées. Surtout depuis qu’il y a eu ce massacre à l’université de Colombine, ces gosses… Tout de suite il a été dit que c’était de la faute du cinéma et des jeux vidéos (…)
Propos recueillis par Didier Allouch à Los Angeles en 2001.
Traduction Jean-Sébastien Décant. Adaptation : Julien Dupuy pour Mad Movies, Hors-Série John Carpenter, 2001.
REGARDS CRITIQUES
« Je faisais tout pour voir Assaut chaque fois qu’il passait quelque part. C’était toujours génial de le revoir. » Quentin Tarantino
« Premier coup de maître du grand John Carpenter, Assaut est un film coup de poing qui mérite amplement son statut culte. ( …)
Le siège de la prison est transposé dans un milieu urbain et contemporain avec un sens de la mise en scène et un montage qui laissent alors entrevoir les qualités indéniables de son réalisateur. Le personnage de l’anti héros si cher à Carpenter apparaît sous les traits du prisonnier Napoléon Wilson, un détenu condamné à mort en attente de transfert et au passé sombre (…) Cet homme dangereux ne manquera pas de soutenir les policiers par les armes pour défendre comme un forcené le commissariat assiégé par un ennemi implacable. C’est d’ailleurs avec ce paradoxe que le personnage en devient au final attachant. Le film livre quelques moments de violence assez durs pour l’époque comme la scène du meurtre de sang froid d’une fillette par le gang (un passage longtemps censuré dans les diverses éditions françaises du film). (…)
Pour un premier véritable film, c’est un coup de maître, (…) un huit clos saisissant, annonciateur du talent d’un réalisateur qui livrera par la suite des œuvres fédératrices comme Halloween, The Thing, New York 1997 et Invasion Los Angeles. La première pierre de l’édifice en somme. » Pierre Vedral (aVoir-aLire)
« 1h30 plus tard après avoir vu le film, ma vision du cinéma avait changé. C’est un des plus grands films du cinéma de genre américain. (…) On a un jeune cinéaste qui affirme son style, un film prodigieux du point de vue de la mise en scène. Le cinéma coule dans les veines de Carpenter. On sent une forme de maturité qu’il atteint d’emblée. Le film représente l’essentiel de ce qui va travailler le cinéma de Carpenter dans les 50 années à suivre. » Jean Baptiste Thoret (Masterclass Carpenter – Cinéma Spoutnik, 8 avril 2014)
« Adoptant pour la première fois un format, le cinémascope, qu’il n’a jamais abandonné après, John Carpenter offre une vision terrifiante de l’homme au cœur du chaos. Un cinéaste est né, et il voit les choses en (écran) large. » Bertrand Rougier (Mad Movies, Hors Série John Carpenter)
« Sens du cadre – magnifique écran large ! –, maîtrise des scènes d’action, virtuosité du récit qui fait monter le suspense et rend d’emblée, les personnages attachants… Dès son deuxième film, le cinéaste fait la preuve de son talent, avec cette vision nihiliste d’une Amérique au bord de l’implosion. Carpenter s’est révélé ensuite plutôt inégal. Mais quels débuts tonitruants ! » Aurélien Ferenczi (Télérama)
« Un film de pure mise en scène, d’une grande force visuelle, avec un sens du cadre, du rythme et de l’espace toujours aussi impressionnants. Ce – presque – coup d’essai (Carpenter avait réalisé auparavant Dark Star, sympathique film de science-fiction à l’humour potache) est un coup de maître. » Olivier Père (Arte)
Presse et distribution
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Physique : FILMS SANS FRONTIÈRES
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Fiche technique et artistique
CREDITS
Réalisation John CARPENTER
Scénario John CARPENTER
Image Douglas KNAPP
Direction artistique Tommy Lee WALLACE
Maquillage Don BLEDSOE
Musique John CARPENTER
Montage John CARPENTER
Produit par J. Stein KAPLAN
Production THE CKK CORPORATION
CAST
Lieutenant Ethan Bishop Austin STOKER
Napoleon Wilson Darwin JOSTON
Leigh Laurie ZIMMER
Lawson Martin WEST
Welles Tony BURTON
Special Officer Starker Charles CYPHERS
Julie Nancy KYES
Distribution : Films Sans Frontières
Durée : 91 min. / USA / 1976 / Visa N°48352
DCP 2K / VOSTF / Scope / Couleur / 5.1